A la fin des années 1970, tout au début de la micro-informatique, la problématique du contrôle de l’informatique était toute simple : les premiers micro-ordinateurs étaient livrés quasiment sans logiciels et n’étaient pas connectés à Internet. Comme ils étaient destinés à des hobbyistes, des électroniciens et des bidouilleurs, l’utilisateur devait apprendre à écrire le logiciel dont il avait besoin pour en disposer.
C’était la situation idéale en termes de contrôle de l’informatique : l’utilisateur saisissait lui-même ses données dans un logiciel dont il avait pleinement le contrôle, puisqu’il l’avait écrit, sur un ordinateur qui était physiquement devant lui.
On le verra, cette situation idéale de contrôle total ne durera pas.
Dans la grande confrérie des développeurs amateurs des premiers micro-ordinateurs, le partage était la norme : devant la rareté des logiciels disponibles, il était normal de partager les logiciels qu’on avait écrits avec d’autres hobbyistes. Le logiciel qu’on venait de recevoir ne fonctionnait pas exactement comme on voulait ? Qu’à cela ne tienne, il suffisait de le modifier pour corriger le problème. Pour cela, il faut comprendre comment fonctionne le logiciel, ce qui est possible s’il est relativement simple et écrit de façon structurée par son auteur.
Mais au fur et à mesure que la micro-informatique est devenue une industrie et que les utilisateurs ont compris le potentiel de l’informatique, que les besoins sont devenus plus complexes avec des enjeux plus importants, certains utilisateurs avancés sont devenus des développeurs de logiciels professionnels à temps plein.
Ce changement, cette professionnalisation, bienvenue pour régler le problème de la complexité croissante des besoins et des logiciels, a créé un un nouveau problème : tandis que jusqu’alors le développeur, l’utilisateur étaient la même personne et avaient donc des intérêts communs, on se retrouve alors avec un utilisateur qui veut un logiciel répondant à ses besoins propres, le développeur cherche au contraire à écrire une seule fois un logiciel qui réponde aux besoins du plus grand nombre, pour pouvoir le vendre à plus de clients possibles et ainsi maximiser son investissement en développement.
Le développeur de logiciels est de fait devenu un « éditeur d’applications » et l’utilisateur dispose de logiciels créés par un tiers : l’utilisateur dépend dorénavant du bon vouloir du développeur.
5 réactions
1 De Leon - 27/01/2015, 12:06
Parfois, on dessine avec un T : "les logiciels qu’on avait écris" et aussi à la fin du paragraphe.
Un exemple sur le fond de ce chapitre : Isa est gauchère et il n'y a aucun logiciel commercial qui intègre cette particularité partagée par une grande partie de la population. Il serait pourtant simple d'insérer un case à cocher dans les "préférences" qui permettent de réorganiser les menus/icônes.
Je continue à suivre ce fil, c'est génial
2 De Biniou180 - 27/01/2015, 14:15
Bonjour Tristan,
Merci pour ces articles, c'est à la fois très intéressant et permet d'argumenter sur l'importance des données privées avec mes collègues/proches!
Je me permet de corriger quelques coquilles (pour une fois que j'arrive en 1er sur l'article )
Encore merci, bon courage pour la suite du livre!
3 De Kevin - 04/02/2015, 06:08
Super article ! Vivement vos solutions !
@ Biniou : "Partager les logiciels qu'on avait écrits". (On avait écrit quoi ? Les logiciels. COD placé devant l’auxiliaire avoir : accord.
4 De Wiz21 - 04/02/2015, 15:56
Salut Tristan,
Je trouve ton analyse un peu idéalisée. En effet, à te lire on a l'impression que les bidouilleurs de l'époque étaient plus partageurs et donc, plus "positifs" (et par ailleurs, "la grande confrérie des développeurs amateurs des premiers micro-ordinateurs" est un peu romantique). Mais l'action de RMS, qui remonte à bien longtemps, montre bien que les "propriétaires" étaient là aussi. Donc la dépendance des utilisateurs envers les développeurs a sans doute toujours existé. De plus, je ne pense pas qu'elle soit le résultat de la professionalisation. C'est l'ignorance des utilisateurs (je ne dis pas ça péjorativement hein) pour la chose technique qui induit la séparation des "pouvoirs". L'aspect amateur/professionel est, je pense, tout à fait secondaire ici.
C'est d'ailleurs cette séparation des pouvoirs qui est au coeur de la difficulté de convaincre les utilisateurs de la nécessité de défendre leurs droits.
5 De instit - 06/02/2015, 10:57
Eh non, Biniou180,
Ce n'est pas :
"partager les logiciels qu’on avait écris => partager les logiciels qu’on avait écrit"
C'est en fait :
"partager les logiciels qu’on avait écris => partager les logiciels qu’on avait écrits" (COD avant auxilliaire)