(Ca va sans dire, mais ça va mieux en le disant : comme indiqué en bas de chaque page de ce blog, ce que j'exprime ici n'est que mon opinion personnelle et ne saurait aucunement être attribué à mon employeur.[1])
(Ce billet est une adaptation de Privacy is a currency).
Cela fait plusieurs mois que je réfléchis à la vie privée. J'ai déjà écris un peu, et j'ai encore beaucoup de choses qui ne sont pas publiées. Et puis je suis tombé sur cet article de Dan Lyons dans NewsWeek, qui explique pile-poil ce que je pense. J'écrivais ceci le mois dernier à propos des services en ligne apparemment gratuits :
Il n'y a pas de prix qu'on peut discuter, comparer avec d'autres. Les utilisateurs — sous prétexte qu'il n'y a pas d'argent qui sort de leurs poches — pensent que c'est une bonne affaire. Ils ne réalisent pas que leurs données personnelles, leur vie privée, valent infiniment mieux qu'un peu de temps CPU issu d'un datacenter. Ca rappelle un peu la conquête de l'Amérique, où les colons échangeaient des terres contre quelques verroteries à des indigènes. L'image est forte, je le reconnais, mais elle évoque bien ce marché de dupes, où une des deux parties ignore tout des règles et se fait donc dépouiller d'un bien très précieux qu'elle ne récupérera jamais.
Dan Lyons — connu pour tenir le blog Fake Steve Jobs — exprime à nouveau ce point de vue, avec une verve que j'aimerais avoir. En voici un extrait, traduit par mes soins :
Notre vie privée est devenu une monnaie. On l'utilise pour payer les services en ligne. Google ne nous demande pas d'argent en échange de l'utilisation de Gmail. À la place, il lit vos emails et vous affiche de la publicité en fonction de mots-clés présents dans vos messages privés.
Mais l'ultime trésor, c'est votre liste d'amis. Avec ces informations, les marketeurs peuvent vous envoyer des messages encore plus ciblés. Si vous aimez un film, un album, un VTT, vos amis vont probablement l'aimer aussi. Ils seront donc des cibles de valeur pour ces produits. Bien sûr, vos amis ne vont pas acheter exactement la même chose que vous. La précision n'est pas millimétrique. Mais ces données aident les marketeurs à faire de la publicité beaucoup plus précise qui est bien plus efficace que la pub à la télé ou les bannières qu'on voit partout sur le Net.
Le génie de Google, Facebook, Google et leurs semblables c'est qu'ils créent des services qui sont tellement utiles ou amusants que les gens vont abandonner une partie de leur vie privée pour les utiliser. L'astuce consiste à en obtenir encore plus des gens, de façon à augmenter le prix du service.
Ces sociétés ne vont jamais arrêter de grignoter notre vie privée. Leur modèle économique consiste fondamentalement à "monétiser" notre vie privée. Pour réussir, elle doivent changer progressivement la notion de vie privée — ce que Facebook appelle "la norme sociale" — de façon à ce que ce que nous abandonnons ne nous paraisse pas important en terme de valeur. Et puis elles doivent gagner notre confiance. Ainsi chaque érosion de notre vie privée se voit accompagnée, paradoxalement, de discours pompeux expliquant à quel point la société X respecte notre vie privée. Je me demande à quel point Orwell serait catastrophé ou impressionné. Qui aurait pu deviner que Big Brother ne serait en fait pas un ministère, mais une bande de gamins de la Silicon Valley ?
Le problème d'acheter des choses avec votre vie privée c'est qu'on ne sait pas vraiment combien on paye. Avec de l'argent, on sait que 5 euros valent 5 euros. Mais quelle est la valeur de votre liste d'amis ? Si elle ne vaut pas beaucoup, peut-être que votre adhésion à Facebook est l'affaire du siècle. Mais si sa valeur est très élevée, vous êtes alors en train de vous faire arnaquer dans les grandes largeurs. Seuls les développeurs savent combien cette information représentent, et ils restent silencieux. Mais le fait qu'ils préfèrent vos données à votre argent en dit long.
Notes
[1] Voir en particulier Ne pas confondre Tristan Nitot et Mozilla
25 réactions
1 De Olivier Rafal - 19/02/2010, 12:30
Certes. Mais je crois que la plupart des gens comprennent à peu près qu'on ne rase jamais gratis, même si on ne sait pas exactement comment l'autre gagne son argent. En outre, les applications payantes ne font pas mieux : elles aussi exploitent au maximum la moindre bribe d'info privée concernant leurs utilisateurs.
En fait, je suis plus choqué par ce deuxième cas : payer un produit ou un service aujourd'hui ne signifie pas, la plupart du temps, qu'on soit exempté de pub ou d'exploitation marketing de ses données.
Illustration in real life, quand une caissière vous demande ingénument, avec grande amabilité qui plus est : "votre code postal ?!" Regardez sa tête si vous avez le malheur de lui répondre, alors que vous venez quand même de claquer plusieurs dizaines ou centaines d'euros : "si je vous le donne, j'ai droit à une remise ?"
Alors peut-être que la donnée privée est une monnaie, mais au moins, quand le service est gratuit, on sait à quoi s'attendre, du coup, la sensation est moins désagréable...
2 De Hugo - 19/02/2010, 12:42
Personnellement je ne suis pas entièrement convaincu par la thèse que défend Dan Lyons. Certes, il est vrai que les services comme Gmail ou Facebook sont gratuits -- ce qui ne signifie pas pour autant qu'ils ne gagnent pas d'argent.
À partir de là, il faut se demander d'où vient cet argent. Comment créent-ils de la valeur? et d'ailleurs, en créent-ils?
En quelque sorte, Dan Lyons répond que non, Gmail et Facebook ne créent pas de valeurs. Ils ne font que prendre notre "vie privée" et il nous la revende par monétisation… c'est-à-dire qu'on leur donne nos données privées/personnelles et en échange, on a de la pub.
Donc plus on a de données, plus on a de pub, plus on fait de l'argent.
J'ai l'impression que c'est beaucoup trop simpliste et que ça évite la vraie question. Quelle est la nature de ces données qu'on laisse à ces services ? Quelle valeur ajoutée ces services nous donnent ? Quelle est la limite entre ce qui est privé, et ce qu'on peut "monétiser" sans atteindre à l'intégrité d'une personne ?
D'ailleurs, tu as traduit "privacy" par « vie privée ». C'est souvent la traduction qu'on en fait, et c'est certainement la transposition la plus simple et rapide du concept. Néanmoins, j'ai l'impression que cette idée de "privacy" va bien au-delà de notre concept de « vie privée ».
Par exemple, j'ai l'impression que la nature de mon statut sur identi.ca/twitter/facebook relève d'une question de "privacy" et pour autant je n'ai pas du tout le sentiment qu'il s'agisse de « vie privée ». Il y avait eu un bref journal intéressant à ce sujet sur linuxfr (Journal : Au delà du manichéisme "vie privée" contre "vie publique" : le droit à la discrétion) qui impliquait l'idée de «discrétion». J'ajouterai qu'il y a aussi la notion d'intimité qui peut entrer en jeu.
Pour finir ce propos, j'ai trouvé un article très pertinent sur TechLiberation, Google Buzz: Encouraging Privacy by Design v. Privacy Paternalism qui soulève quelques les subtilités de la notion de "privacy".
3 De Hinault Kévin - 19/02/2010, 12:51
Ce qui est bien avec le logiciel libre c'est que c'est une vraie philosophie montrant le monde autrement grâce notamment à la reflexion sur les parallèles gratuit / non gratuit, libre / non libre.
Amusant ce que tu énonces ici est directement issu de cette façon de penser du LL : la liberté est aussi une forme de ressource (je n'aurais pas parlé de monnaie) que l'on peut perdre. Souvent quand je tente d'expliquer les bienfaits du logiciel libre, je me heurte à l'incompréhension des gens n'imaginant pas leur perte.
C'est le même problème avec la vie privée à une différence près sur le potentiel liberté que l'on a la naissance :
Je crois que tu touches ici un truc très important mais qui te vient d'une philosophie difficile à transmettre.
4 De Laurent - 19/02/2010, 13:11
Bizarre , on se pose la question de combien ça peut coûter une liste d'ami ? Moi je me pose la question : est ce que tout peut se vendre ? Mes amis ne sont pas à vendre. Je ne suis plus sur Facebook, et je vais laisser tomber mon adresse mail chez google.
Et passer par un prestataire payant pour avoir mon mail.
5 De --Nico - 19/02/2010, 14:10
Hors-sujet
Il faut toutefois être un peu naïf pour comparer ce problème à:
Nous en venons à mépriser l'histoire avec ce genre de référence. Si cela a pu effectivement arriver en de rares occasions, les "indiens" échangeaient généralement des biens contre des biens ou de la nourriture contre des biens. Même si l'échange semblait, en apparence, aller dans un seul sens...
Quant à leurs terres, elles leur ont tout simplement, et ce, sans aucun scrupule, été volées par les colons.
Pour ceux que ça intéresse, ++Découvrir l'Amérique++ de Ronald Wright devrait casser bien des préjugés sur la conquête de l'Amérique (car nous parlons bien de conquête).
/Hors-sujet
Toujours est-il, pour en revenir au sujet, que la question de la vie privée sur Internet mérite d'être posée.
Comme toi, Tristan, je suis en train de bâtir ma réflexion et ignore encore quelles sont toutes les conséquences (à part les cas classiques, du genre l'employeur qui licencie un employé suite à des photos olé-olé) auxquelles s'exposent toutes ces personnes qui, sans y penser, se dévoilent au grand jour sur les sites dits sociaux. L'avenir nous le dira.
En attendant des réponses plus concrètes et surtout plus complètes, je limite grandement les informations que je donne et essaye de me limiter à diffuser du contenu professionnel la plupart du temps.
Une chose est sûre, même en restant (très) prudent, un moteur de recherche comme Google pourrait (doit?) en savoir beaucoup sur nos centres d'intérêts et sur ce que nous faisons dans la vie de tous les jours. L'historique de recherche doit permettre de tracer un bon (excellent?) profil pour chaque utilisateur.
Je pense qu'il est peut-être aussi et/ou plus important de protéger les données que nous divulguons indirectement (par exemple, une recherche) que celles que nous divulguons sciemment (Facebook, MySpace, Twitter, etc.). Quand une personne poste une photo sur Internet, elle devrait être consciente que le cadre de la vie privée pourra être dépassée d'une façon ou d'une autre (que ce soit par la confidentialité douteuse du site hébergeur ou celle, toute aussi dangereuse, de ses soit-disants "amis").
My 2 cents. Le débat ne fait que commencer.
6 De Phantom_13 - 19/02/2010, 14:20
Tout le monde d'un tant soit peu informé sait, et voit, ce qui se passe sur nos données privées.
Et Google en est le meilleur exemple.
Mais pas le seul.
George Orwell était sacrément visionnaire, avec son livre ( sorti en 1946 me semble t'il ) « 1984 » que beaucoup devraient (re)lire.
Je pense que très peu ont conscience du phénomène décrit par Tristan Nitot et Dan Lyons, et comme pour apprendre à des Windowsiens que Linux c'est pas compliqué, il faut(drait) informer et éduquer les internautes ( comment est la question ).
Les internautes un tant soit peu éclairés sur la question savent de quoi il retourne et font des choix en leur âme et conscience, du moins je pense.
Faire prendre conscience aux gens de ce qui se passe avec leur/notre vie privée.
On voit très bien le côté négatif du/des réseau(x) social(aux) mais difficile de s'en passer, après à chacun de diffuser ce qu'il souhaite, du moment qu'il a conscience de ce qu'il laisse à des sociétés comme Big Brother Google ( que perso je n'utilise plus depuis longtemps ).
Je fais partie d'un monde libre ( enfin je le pense ), Linux, et même si je n'ai rien à cacher, j'entends le rester, libre.
Hors de question ( pour moi ) qu'une société X sache tout ce que je fais, comment je m'appele, où je vais, qui sont mes amis etc...
Mes données sont privées et j'entends qu'elles le restent autant que faire se peut.
L'avenir nous dira de quoi il sera fait, mais à nous de faire en sorte qu'il ne soit pas trop noir
7 De egan - 19/02/2010, 14:49
Comme j'ai les extensions Adblock et MinimalistGmail je ne vois même pas les pubs super-ciblées que Google est censé me balancer.
Du coup c'est plutôt moi qui les roule non ?
8 De Anonym - 19/02/2010, 15:10
Une chose très importante qui n'est jamais précisée dans ce genre d'article (avec lequel je suis assez d'accord) c'est que La valeur de nos infos privés ou de notre liste d'ami ne peut EN AUCUN CAS être comparée comme ici avec de l'argent par exemple.
Ce'st exactement la même chose que la confusion entre la copie et le vol. Déjà ma liste d'amis si je la "donne" à Google rien ne m'empêche de la "donner" aussi à Yahoo ou autre. Ensuite ma liste d'amis n'a pas de valeur monétaire pour moi. Si j'ai 5 Euros en poche je peux acheter des clopes avec , je ne peux pas acheter des clopes avec ma liste d'amis.
Donc finalement j'échange quelque chose qui n'a pas de valeur MONéTAIRE (je dis pas que mes infos perso ont pas de valuer, pas de valeur monétaire c'est différent) pour moi à une société pour qui elle en a et en échange la société me fourni un réel service.
Voilà, ne vous méprenez pas je suis conscient du besoin de protection de vie privée toussa mais c'est pas pour autant qu'il faut utiliser des arguments parfois limite.
9 De Anonym - 19/02/2010, 15:12
Dans un autre genre je pense qu'on dervait plus citer Huxley Que Orwell dans ces discussions, Orwell c'était un système totalitaire, ici on va à l'abattoir de notre propre grés, limite en chantant , beaucoup plus proche du meilleur des mondes que de 1984.
Voir
http://www.recombinantrecords.net/d...
10 De Ysabeau - 19/02/2010, 15:17
J'ai toujours été réticente à donner plus que le minimum à une entreprise comme Google, et même ça commence à être un peu trop. Alors j'utilise de plus en plus d'autres moteurs de recherche.
Quant à Facebook, je n'y mets pas grand chose. Il ne faut jamais oublier que tout cela fait le tour du monde et peut être archivé quand qu'on puisse contrôler quoi que ce soit, comme pour les blogs d'ailleurs.
Et je préfère que mon courrier arrive sur mon ordinateur et soit conservé là que uniquement sur un webmail (que je consulte aussi quand je ne suis pas chez moi).
Google, à mon sens possède une masse d'informations démentielles sur les personnes, le genre de choses qui fait baver énormément de gens, hommes d'affaires, comme ... hommes d'état et plus assez de scrupules pour que l'on puisse encore lui faire confiance. Par ailleurs, on peut imaginer qu'un jour un homme politique aie envie de s'emparer de ses données pour son "usage personnel" et des ennuis ses fins pour les populations concernées. Et là je ne vois pas comment cette entreprise pourrait contrecarrer une volonté politique surtout si elle vient en armes. Le danger est donc double et doublement préoccupant.
11 De Gauthier Delamarre - 19/02/2010, 15:54
Il va de soi que les collectes d'informations à tout-va deviennent exaspérantes. D'un autre côté, il ne faut pas je pense tomber dans le fantasme, voire le délire paranoïaque. De même qu'il ne faut pas confondre les termes "personnel" et "privé".
Mon adresse email est-elle une donnée privée ? Sans doute pas. Personnelle ? A coup sûr. Maintenant, dois-je plus m'offusquer que l'on collecte cette adresse dans des bases de données ? Cela doit-il plus ou moins me scandalisé que lorsque l'on fait la même chose avec mon adresse postale ? Pas évident...
Je dirais surtout que dès lors que les règles du jeu sont connues : "j'utilise un service, gratuit ou payant, peu importe, qui fera un usage probable de mes données personnelles..." suis-je prêt à accepter cette contrainte ? si oui, je l'utilise, si non, je m'en passe.
Des sites tels que 123people me semblent nettement plus détestables à cet égard, puisqu'ils exploitent des données personnelles, voire privées (ils ne font pas la distinction), et souvent même erronées, sans même fournir le moindre service en contre-partie.
Enfin, pour ce qui concerne 1984, il a été écrit en 1948 (d'où le titre, inversion des deux derniers chiffres) et publiés quelques mois plus tard, en 1949
12 De francis - 19/02/2010, 17:02
Question fondamentale que tu poses là Tristan, et malheureusement un peu déprimante.
Mais pour moi les choses ne pourront changer que si il existe des alternatives proposant un niveau de service équivalent ou supérieur.
Je n'utilise pas Windows parce que j'ai tout ce qu'il faut sous Linux, et plus encore.
Je n'utilise pas Internet Expolorer parce que j'ai tout ce qu'il faut sous Firefox, et plus encore.
Mais qu'elle est l'alternative à Gmail ou autres ? Avoir son propre serveur de mail à gérer soi-même ? On peut pas dire que c'est très user friendly, sans compter le problème du coût. Et pour Facebook ?
Donc l'enjeu pour les logiciels libres est de proposer quelque chose d'équivalent, de meilleur même, gratuit et assurant la privacy des données, le tout géré par une fondation ayant ses propres ressources financières.
Utopique ? Peut-être mais Jimmy Wales a bien réussi à le faire avec wikipedia.
13 De Christophe Démaret - 19/02/2010, 17:05
Comme lors de mes précédents commentaire sur le billet Google, j'attends toujours que l'on m'explique en quoi ma vie privée est mise à mal par l'usage de Gmail davantage que par celui d'OVH.
Personne d'autre que moi (personne d'humain, donc, un robot ce n'est "personne") n'a accès à mes mails personnels. Personne non plus n'a accès à mes contacts à mon agenda ou au reste.
Un robot, certes y a accès. Comme RoundCube, Apache, Firefox y ont accès si je suis chez OVH. Mais ça fait longtemps que je ne m'embarrasse pas du jugement de mon Firefox.
Tant que mes amis, ma famille, mes collègues, mon employeur, la police, HADOPI,... n'ont pas d'accès à ces données, je ne vois pas en quoi il y aurait plus un pb avec Gmail qu'avec n'importe quel hébergeur.
14 De LaurentB - 19/02/2010, 18:55
J'avais publié un billet dans ce sens après la sortie de Google Wave.
C'est certainement Google qui est en ligne de mire par rapport à ses nombreux outils et services qui capitalisent sur les données utilisateurs.
Quoi qu'il suffit de surveiller les connexions sortants de l'ordinateur pour se rendre compte que ça dépasse les limites du raisonnable. Tout le Web est en chasse pour en savoir plus sur l'utilisateur.
Je conseille le logiciel Little Snitch à tous les propriétaires de Mac.
15 De Apache - 19/02/2010, 21:25
Insinuer que les Amérindiens auraient perdu leurs terres (et aussi, un peu, que ça serait la raison de leur déclin) en échange de quelques verroteries... c'est du négationnisme, ça ! Je vais faire comme si je n'avais rien entendu...
Mais ça pose la question de la propriété privée. Parce que si je ne me trompe pas, comme dans beaucoup d'endroits et depuis longtemps, chez les Amérindiens la propriété privée pour la terre n'était tout simplement pas imaginable, on ne pouvait pas être propriétaire de terres.
Donc quel est le sous-entendu dans ce choix d'exemple, celui de la terre des Amérindiens ?
Que les Amérindiens auraient dû adopter le système de pensée des colons, au moment où ils sont arrivés ?
C'est-à-dire, appliqué à la vie privée, que les utilisateurs de ces services devraient marchander leur vie privée ?
J'avoue ne pas très bien comprendre le message...
C'est assez ambigu...
16 De Matthieu H - 19/02/2010, 21:43
La question de la vie privée sur Internet devient vraiment préoccupante. La réflexion sur le sujet est douloureuse car on se rend vite compte que les différentes questions qui se posent son difficiles à trancher. En découle une approche des moins évidente. Cependant, comme Tristan et beaucoup d'autres personnes j'essaie de nourrir ma propre réflexion tant bien que mal, mais rester objectif là dessus devient vite compliqué je trouve. Alors je vais essayer d'apporter ma pierre à l'édifice, qui est certainement bancale mais qui, en se confrontant à d'autres réflexions trouvera, je l'espère, son équilibre.
Nous parlons beaucoup de Google et de Facebook, je ne vais pas vous le cacher plus longtemps, ce sont deux sociétés qui m'inquiètent, comme d'autres aussi bien sûr, ce sont simplement les deux plus parlante tant elles sont ancrées dans notre quotidien.
Google a un formidable moteur de recherche, soit. Mais c'est le moteur le plus utilisé, et par conséquent celui qui connait le plus ce que cherche et ce que regarde les gens du monde entier. Mais après tout c'est un moteur de recherche, c'est juste son job. Après vous avez GMail, qui lit vos mails pour vous afficher de la pub, bon très bien, personnellement ça ne me gênait pas au début (étant informaticien j'ai l'habitude des traitements automatisés). Ensuite vous avez Youtube, autre service de Google, qui, on peut le dire, reste un énorme (si ce n'est le plus gros) site de streaming du monde entier. On peu parler de Google Talk aussi, qui s'occupe de la messagerie instantanées. Et maintenant vous avec Google Chrome, le navigateur qui vous donne accès au web. Google Chrome OS, qui contrôlera des PC. Android qui vous suit partout. Maps, qui gère vos déplacements. Earth qui comblera votre curiosité. Maintenant Buzz, qui tissera votre réseau social. Facebook, qui sera racheté par Google (fantasme aujourd'hui, réalité demain ?). Bref, l'inquiétude à avoir avec Google est sa métamorphose en pieuvre géante dont l'objectif est de s'immiscer sur toutes les couches du réseau. Ainsi Google pourrait savoir à quelle heure vous vous levez (Android), ce que vous mangerez ce midi (recettes sur Google), où vous travaillez (Android toujours), le premier site qui vous intéresse (Chrome), l'application qui mérite toute votre attention (Chrome OS), vos envies de voyage (Maps et Earth)..... tout ce que Google voudra, Google le saura. Quoi qu'on en dise, vous trouverez peut être ça un peu paranoïaque, mais quand une entreprise veut s'installer partout, il est impossible qu'elle ne veuilles exploiter tout son potentiel. Et quand Google ne se limite même plus au monde virtuel, alors il est temps de réagir. Comment ? Là est la question. Google a su créer des dépendances énormes et il sera difficile de s'en défaire.
Maintenant prenons Facebook. Oui, encore Facebook. Je ne veux pas m'enliser dans les débats habituels du genre "Facebook c'est mal ils ont accès à tout ce que tu racontes, donc à toute ta vie". Il y a du vrai, il y a du faux. Mais admettons que Facebook soit une société tout à fait honnête. Ce n'est qu'une société. Qui sera rachetée tôt ou tard par un plus gros. Google ? Microsoft ? Virgin ? Monsanto ? Peu importe. Mais alors, lors d'une passation de pouvoir sur des bases de données énormes comme celles de Facebook, comment être sûr qu'elle ne seront pas violées volontairement, ou involontairement ? Comment être sûr qu'une migration sur un autre système ne va pas ouvrir la voie à des pirates et permettre par là même à tout à chacun de lire n'importe quel profil ? Après tout, ce ne sont que des données binaires et qui croit un système informatique sécurisé, court à sa perte.
En conclusion, je pense qu'il ne faut pas perdre de vue que les données d'une façon générale ne sont que des fichiers logés sur des disques durs, parfois protégés par des systèmes, toujours non fiables par définition. Et à partir du moment, où des données sont stockées, on peut en faire absolument tout et n'importe quoi. C'est le principe même de l'informatique tel qu'on le connait. Et ce ne sont certainement pas des sociétés qui peuvent prétendre avoir un contrôle total sur ces données, ou plutôt si, mais peut être pas celui que nous attendions lorsque nous cochons "J'accepte les conditions d'utilisation de ce service". Et comme je le disai, Google et Facebook sont tellement ancrées dans notre quotidien, qu'il est de toute façon logique qu'elles en sachent vraiment très long sur nous.
Et pour finir, je tiens à remercier Tristan pour prendre le temps de nourrir ce sujet, tant cela concerne nous tous au plus haut point. Un ouverture car ce serait trop long à traiter ici : les sociétés savourent nos données personnelles, mais ne nous voilons pas la face, les gouvernements désirent nettement plus.
17 De valid - 19/02/2010, 22:01
« Notre vie privée est une monnaie »
... j'ajouterais : si et seulement si nous avons la capacité d'acheter ce que le ciblage publicitaire cherche à nous vendre.
Le contexte chaotique sur le marché de l'emploi et de l'économie fait potentiellement, d'un nombre considérable de personnes dont la vie privée sert au ciblage, des non-acheteurs.
Et si nous ne sommes plus en capacité d'acheter ce que le ciblage publicitaire cherche à nous vendre, les informations sur notre vie privée ne valent plus rien...
18 De Matthieu H - 20/02/2010, 00:45
Qu'est-ce que je disais déjà ? Ah oui
19 De Bernard - 20/02/2010, 16:46
Excellent article Tristan!! Merci de continuer de travailler sur ces sujets et de faire les efforts nécessaires pour partager ta vision.
Connais tu des alternatives à ces outils de réseaux sociaux?
L'idéal serait j'imagine un outil Peer to Peer et open source. J'ai l'impression qu'un tel outil serait très simple à développer et je me dis que quelqu'un a déjà du le faire.
20 De christian - 20/02/2010, 19:44
au lieu de se lamenter, de critiquer, commençons par nous anonymiser un peu! En vrac je vous donne openDNS pour filtrer si vous voulez , comme moteur de recherche vous pouvez varier en prenant par exemple CUIL.com , Exalead.fr, et le plus fou que j'ai trouvé ixquick avec Firefox c'est enfantin d'ajouter des moteurs de recherches
pour faire des recherches plus ciblées et brouiller les pistes.......
21 De Fakir Séditieux - 21/02/2010, 01:53
Une des options pour protéger une partie de sa vie privée sur le Net :
http://www.agoravox.fr/actualites/t...
Si on y associe l'utilisation de moteurs de recherche comme comme Yauba
http://www.2803.fr/internet/yauba-l...
http://fr.techcrunch.com/2009/04/30...
ou un méta-moteur comme comme iXquick, on aura fait une grande partie du chemin et il ne restera plus qu'à se prémunir d'outils comme Twitter en le remplaçant par identi.ca ou gMail par d'autres Webmail moins intrusifs. Je ne sais pas s'il en existe pour des non-geeks - comme ma belle-mère - mais un truc comme un compte mail @laposte.fr doit être largement suffisant pour 95% des usagers. En attendant de connaitre mieux pour toutes les belle-mères du monde... Pour les autres il y a toujours RoundCube ou Zimbra.
Reste à trouver une alternative à Facebook ou même à Google Wave, si ce dernier devait un jour susciter l'adhésion - techniquement il le mérite - ?
Ben... en attendant de la voir apparaitre il faut juste se poser la question si avec tous les types de webwares que le réseau nous offre un compte Facebook est indispensable ?
22 De Tristan - 21/02/2010, 09:48
@Valid qui écrit "si nous ne sommes plus en capacité d'acheter ce que le ciblage publicitaire cherche à nous vendre, les informations sur notre vie privée ne valent plus rien".
Attention, grosse erreur en vue !
Si tu ne peux pas acheter ce que la pub te propose, alors effectivement les données qui sont récupérées sur toi ne valent rien pour les services en ligne.
Par contre, c'est toujours aussi dommageable pour toi.
23 De Guacamolage - 21/02/2010, 13:41
@Tristan et @valid cf
Extrait de l'article de Dan Lyons reproduit plus haut :
Même si l'on est incapable d'acheter, nos "amis" eux potentiellement le peuvent, et en première instance cela est essentiel.
Je ne vois pas pourquoi réduire la réflexion aux services en ligne ? : ces informations personnelles peuvent tout autant intéresser les entreprises de services en ligne que celles vendant par exemple des machines à laver, nombre de groupes ayant d'ailleurs diverses activités, allant de produits et services bien concrets à d'autres plus virtuels...
Le fait de ne pas être en mesure de se procurer (par pauvreté, non-envie, non-besoin - de la radinerie pouvant s'en mêler) les services ou produits vantés par la pub est une situation qui peut changer : quelqu'un de pauvre peut espérer voir son niveau de vie s'améliorer, donc répondre plus facilement, compte-bancairement parlant, aux appels de la publicité en ligne se basant sur toutes les informations personnelles collectées depuis des années.
Même un pauvre consomme, en premier lieu certaines choses essentielles comme la nourriture ou la lessive et, la télévision l'a amplement démontré, ces produits sont des objets de publicité, visant riches comme pauvres, voire souvent préférentiellement ces derniers - ce point mériterait quelques développements...
Ainsi, les informations personnelles collectées sur notre compte, quel que soit notre niveau de vie, valent quelque chose.
AU SUJET DE COQUILLES :
là je m'adresse au filtreur dpi (défense de publier des immondices :
j'ai noté quelques coquilles, donc pas la peine de publier ce qui est ci-dessous bien entendu :
(petit aparté avant les coquilles : j'ai regardé un doc qui s'appelle Le monde selon Google ; il y est pas mal question de la vie privée, notamment à partir de la 21ème minute : très intéressant)
24 De Paul Ambois - 21/02/2010, 13:51
Je me pose la question :
Google n'a-t-il pas créé la gêne éthique avant de parler de Chrome aux hommes ?
25 De Troll - 22/02/2010, 10:19
Pourquoi ne pas commencer par s'anonymiser (ça se dit ça?) en utilisant des pseudos, et plusieurs comptes mail, un par "activité" par exemple. Ne serait ce que pour ne pas tout mélanger. Et quand Google envoie de la pub ciblée sur le mail privé de mon avatar dans un jeu médiéval, ben je me marre... Cela ne m'empêche pas, au travers du dit avatar, de rencontrer irl des gens avec je joue depuis des mois et des mois, et au final, si bonne entente il y a, de leur donner un peu plus d'informations, mais par un autre canal. Idem sur facebook, où j'ai plusieurs comptes. Et où je ne laisse quasiment rien trainer. Allez, gardez le moral, faut juste apprendre à utiliser les nouvelles règles, et ne pas réagir comme au XXième siècle face aux outils du XXIième siècle.