Politique

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vendredi 31 mars 2023

Privilège, égalité et oppression

Voici une citation que j’ai trouvé en ligne et qui me semble d’une rare justesse.

Elle est en anglais au départ, mais se traduit bien en français. Son auteur n’est pas déterminé.

When you’re accustomed to privilege, equality feels like oppression

Version française :

Quand on est habitué à être privilégié, la demande d’égalité est ressentie comme de l’oppression.

lundi 16 mai 2022

Pensées philosophiques

Je veux bien sauver la planète, mais vous auriez un moyen pour que je ne change aucune de mes habitudes ?

Dessin de Marc Dubuisson

J’ai eu une discussion passionnante sur Twitter (une fois n’est pas coutume !)

Je posais la question suivante :

Il y a un mot que je cherche, celui qui désigne le fait que nous vivons de façon civilisée (à peu près), c’est à dire le contraire du chaos. Si l’humanité sombre dans le chaos climatique et que l’humain survit (un peu) qu’aurons-nous perdu ? C’est ce mot que je cherche.

Les réponses ont été nombreuses et souvent constructives, (les autres étaient souvent drôles), et ça m’a fait réfléchir. Petit tour d’horizon :

Souvent, on m’a proposé le mot ordre (le contraire du chaos), mais c’est un peu réducteur et peu compréhensible, trop abstrait. Par exemple, on peut considérer qu’une dictature offrirait de l’ordre à ses citoyens. Mais on aurait perdu au passage la démocratie et la liberté. Et puis l’ordre ne dit rien sur des sujets importants comme la solidarité, la sérénité, qui me paraissent importants.

Le mot civilisation est aussi souvent revenu. On peut s’imaginer dire “si le chaos s’installe, on va y perdre notre civilisation”, mais deux compréhensions sont possibles :

  1. Cela peut signifier “on va y perdre notre coté civilisé”, et c’est très proche de ce que je veux dire : les avancées de notre société vont se perdre, et je ne le souhaite pas. Bien sûr, la société occidentale est très imparfaite, mais il y a des choses, des acquis, qu’on veut vouloir conserver alors qu’elle évolue. Je pense par exemple aux institutions qui permettent la solidarité (assurance chômage, sécurité sociale), l’éducation bon marché, etc.
  2. Cela peut aussi dire “la civilisation occidentale va disparaitre”. Et là, au contraire, c’est peut-être quelque chose de souhaitable, tout bien réfléchi. Pourquoi ? Parce qu’aujourd’hui, notre mode de vie n’est pas du tout soutenable. Vouloir ne rien changer est contre-productif. Il va falloir changer plein de trucs, en particulier notre rapport à l’énergie et à la consommation en général. Et je pense que ces changements, qui semblent difficiles aujourd’hui, ne sont pas si compliqués que cela. À l’inverse, il y a plein de choses formidables en occident au XXIe S. Que je souhaite conserver dans le futur.

On m’a à plusieurs reprises suggéré le mot humanité. Le problème, c’est que le mot humanité peut aussi bien couvrir ce qui fait que nous sommes humains et les traits les plus nobles de l’humain, le rire, la solidarité, le débat, le monde des idées. Mais cela peut aussi designer l’espèce humaine, ce qui crée de l’ambiguïté. En effet, on pourrait dire ou écrire “suite à l’effondrement climatique, l’humanité a perdu toute humanité”.

Plus créatif, amadmaxia, (merci Mac Loyat), « du grec : madmax avec le a privatif devant et le a derrière pour faire mot grec ».

Plusieurs ont suggéré neguentropie, concept cher à l’ami Bernard Stiegler, mais comme le dit Sylvain, « personne ne comprend ». Idem pour le contraire de l’anomie de Durkheim.

On m’a aussi parlé de société, mais c’est trop peu précis : une société peut être plaisante à vivre et sophistiquée, ou au contraire très inconfortable et rustre. Il faudrait préciser. C’est un peu comme pour vivre ensemble. On peut vivre ensemble de façon contrainte et pénible (par exemple en prison) ou bien vivre dans la liberté et le bonheur.

En fait, il faudrait faire une périphrase, prendre un de ces mots et le préciser, cela pourrait donner « notre capacité à vivre ensemble sereinement et en solidarité », que j’ai suggéré.

Et puis cette conversation m’a rappelé un livre que j’ai adoré, Prospérité sans croissance de l’économiste anglais Timothy Jackson. Tim Jackson parle de prospérité.

Prospérer, c’est à la fois réussir dans la vie et se sentir bien dans sa vie (…), les choses vont bien pour nous et pour ceux que nous aimons. (…) La prospérité évoque l’élimination de la faim et l’idée que tout le monde puisse avoir un toit, la fin de la pauvreté et de l’injustice, l’espoir d’un monde sûr et pacifique.

Il continue :

La possibilité du progrès social nourrit le sentiment rassurant que les choses s’améliorent – et si ce n’est pas toujours pour nous, au moins l’est-ce pour ceux qui viendront après nous. Une société meilleure pour nos enfants. Un monde plus juste, où les plus défavorisés pourront sortir de l’ornière.

Peut-être est-ce ce terme qu’il faudrait conserver pour désigner ce qu’on perdrait en cas d’effondrement climatique, notre prospérité, telle que Tim Jackson la définit ?

mercredi 16 février 2022

Le rapport toxique entre les français et l'automobile

Vidéo de Frédéric Mazzella ,fondateur et président de BlaBlaCar

Frédéric Mazzella, fondateur et président de BlaBlaCar, explique très bien dans une vidéo[1] à quel point la voiture est un énorme gâchis. Ici, il ne fait référence qu’à l’aspect financier des ménages, sans mentionner ce qui vient s’ajouter d’un point de vue pollution, crise climatique et santé publique :

Quand on regarde les coûts qui sont associés à la voiture : une voiture ça coûte environ 6 000 euros à l’année, il y a 38 millions de voiture de France, ça fait à peu près 200 milliards d’euros[2], soit 10 % du PIB.

Donc chaque année on dépense environ 10 % de notre PIB à faire tourner nos voitures.

Dans les coûts des 6 000 euros par an[3], il y a l’essence, le péage, la dépréciation du véhicule, l’assurance, les réparations, le parking, on met tout ça dans une enveloppe, ça fait 6 000 EUR par an, ça fait 200 milliards pour le pays.

Ensuite, on regarde comment on utilise nos voitures, et on se rend compte qu’il y a une très très très grande inefficacité d’usage. Parce que non seulement les voitures passent 96 % de leur vie arrêtées, mais elles passent 0,5 % de leur vie dans les bouchons, 0,8 % de leur vie à chercher une place de parking, il reste 2,7 % de leur vie où elles vont effectivement d’un point A à un point B, ce pour quoi on les a conçues au départ et en plus, quand elles roulent, 3 fois sur 4 il n’y a qu’un conducteur à bord, donc il y a trois places libres.

Ce qui fait qu’on utilise un quart de 2,7 % d’une ressource qui nous coûte 10 % du PIB. Ça c’est l’utilisation[4] rationnelle qu’on fait de la voiture, ce qui est totalement irrationnel.

Par ailleurs,

Autrement dit, il est peut-être temps de repenser notre rapport à la voiture.

Notes

[1] Lors de la conférence Web2Day 2018 à Nantes.

[2] On notera deux approximations qui s’annulent : 6 000 * 38 000 000, ça fait 228 milliards, soit 14 % de plus qu’annoncé, mais ça reste du même ordre de grandeur. Le PIB en 2017 (chiffres officiels disponibles au moment de la vidéo) était de 2 291,7 milliards d’euros, ce qui fait que les 228 milliards représentent 9,95 % du PIB.

[3] Les chiffres sont bien sûr variables selon les sources, mais pour l’Automobile Club Association, qu’on ne peut soupçonner de complaisance dans un sens ou dans l’autre, on tombe sur 6063 € par an pour une Clio essence roulant 8638 km par an.

[4] Il dit « utilisation », mais je pense qu’il veut dire « analyse ».

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